LES YEUX ÉCARQUILLÉS.
Le moulin à plumes de La De.
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Illustration Brigitte de Lanfranchi, texte Christian Bétourné – ©Tous droits réservés.
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La conscience est au pôle, blanc comme une absence, où le soleil ne baisse jamais
les yeux sur les paysages sauvages illuminés jour et nuit.
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Dans les pâturages infinis des espaces nordiques coulent de grands troupeaux
de rennes laineux, en vagues lentes, dans la brume glacée qui scintille.
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Des ces lieux arrêtés, comme l’est le temps l’été durant, l’esprit du monde ne dort jamais.
Ses yeux sont les grands lacs immobiles, et leurs regards d’eau verte,
qui ne clignent jamais,
regardent, écarquillés, la pulpe jaune des ardeurs solaires
et leurs reflets dansants.
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Ils ondulent et jouent sur les grandes ondes circulaires,
s’élargissant lentement jusqu’aux rives désertes.
Au ras de la surface aveugle
de ces pupilles multiples, les poissons joueurs, de leurs nageoires
noires, s’évertuent en vain à fendre les flots qui toujours
se referment.
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La terre craque et soupire sous la flore timide.
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La chaleur dessine sur les pans figés des glaces hivernales
des ruisselets, dont les mailles sculptent sur le sol consentant des résilles
fragiles, des chapelets de gouttes irradiées
qu’aucune Arachné n’habite .
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Parfois, le temps d’un sourire esquissé, une fleur pointe le bout de sa corolle
ardente.
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C’est en ces vastes lieux que s’élaborent les possibles plans des futurs imaginés.
Qui sait lequel sera élu?
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Le temps est à l’éternité qui jamais ne connaît le repos.
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Les yeux écarquillés jusqu’à ce que la nuit, enfin, vienne.
Excellent poeme qu’on lit avec des yeux exacerbés…