LA JEUNE BOURGOGNE MÛRE À POINT…

Jean-Baptiste Paul Guérin. Le sous-lieutenant Joachim Murat.

 

Le Maréchal, à la dixième génération, aurait-il laissé trace de son passage, du temps de sa sous-lieutenance, en Bourgogne, en la personne d’Hervé Murat, vigneron de son état ? «Pirapce beute note choure…» ! Pourtant, quand l’œil de l’esprit traverse le temps, la ressemblance avec Hervé est frappante… A l’imagination intuitive, rien d’impossible !

Hervé s’installe en 2005 à Nuits Saint Georges, « riche » d’un hectare et cinquante deux ares de Hautes Côtes de Nuits « Les Herbues » qui lui vient de son grand père. Depuis 2007 une activité de négoce est venue compléter la gamme sur des appellations village et premier cru de la Côte de Nuits. C’est ainsi que sur le millésime 2009, ce n’est pas moins de neuf cuvées qu’il vinifie et élève. A ce jour, à force de travail, Hervé règne, en main propre, sur trois hectares et quarante ares, auxquels s’adjoignent les achats de raisins de son entreprise annexe. Petit à petit le petit sous-lieutenant Nuiton va, pour sûr, prendre du grade…

A tout cœur tout honneur, la cavalcade des rouges du millésime 2009 commence par la vigne fondatrice du domaine :

Le Bourgogne Hautes-Côtes de Nuits « Les Herbues », 9000 flacons, d’un beau rubis grenat, est résolument dédié à la griotte et ce, à tous les étages. La mûre l’accompagne. La bouche riche, à la matière conséquente et racée, finit, bien longue et prégnante, sur des petits tannins croquants, torréfiés et précis. Prêt à entrer dans la coterie des Hautes Côtes…

Le Bourgogne Hautes-Côtes de Nuits Rouge « Le Clos Duc », quarante deux ares et 3000 fiasques est la fierté du domaine. Sur le dessus du disque rubis, irisé de lueurs violettes et roses intenses, la pivoine crémeuse, au calice parfumé sous des fragrances minérales, s’ouvre et vous salue. Sous la fleur, la griotte des Hautes Côtes, à la suavité finement amère, vous mets la langue en turgescence. La bouche, à l’équilibre tendu, réitère et vous tapisse le palais d’un coulis de fruits tramé de tannins minuscules, frais et finement salés qui vous honorent d’une présence qui n’en finit plus. Un vin pour qui le vinificateur a fait patte douce. Comme le rubis – qui illumine les étiquettes du domaine – est le prince des cabochons précieux, le  ” Clos Duc » est un des plus hauts joyaux des Côtes…

Morey-Saint-Denis « Le Village », 900 fioles doucement extraites d’une parcelle lilliputienne au cœur du village, et concoctées pour un tiers sous bois neuf. Un vin jeune, et ses notes vanillées l’attestent, qui amène le verre à l’émoi et fièvre pourprée, quand on le verse. Le jeunot, taiseux, ne consent à s’entrebâiller que peu et lâche un « pet » épicé classieux, avant que de daigner donner ses fruits au sang. Un jus replié ravit déjà la bouche cependant, de son grain fin et racé plein de promesses. Un village « sur le haut ! », à terme.

Morey Saint Denis « Les Charrières », quelques 600 bouteilles produites d’un premier cru idéalement situé sous le Clos de la roche ! Une dentelle de rubis cœur de framboise, aux notes aériennes de fruits mûrs et doux qui planent avec grâce sous le nez. Son jus tendre de fruits frais, à la matière prégnante, noie la bouche sous un flot mûr et goûteux puis s’installe avec élégance et finit en laissant au palais le souvenir long de ses fins tannins soyeux. Un « Loup » Morétain de haute lignée.

Chambolle-Musigny « Les Échézeaux » : 900 bouteilles de pur rubis incarnat. La grande finesse olfactive de ce vin aérien se retrouve en bouche. Une dentelle de cerise sauvage et de fruits rouges, ample cependant, sur un bois discret. Le langage de l’élégance, de la retenue, de la soie crissante, qui déclenche le désir… de boire.

Nuits-Saint-Georges « La Petite Charmotte » : 900 aiguières d’un vin de sombre rubis dont la puissance appelle les 30% de fûts neufs qu’il digèrera sans peine à terme. Naturellement concentré sans qu’il ait fallu l’extraire trop, ses fruits sauvages et cacaotés, son cuir frais, encore tendus par la jeunesse, impressionnent par leur matière puissante marquée par la réglisse et l’empreinte minérale de son berceau pierreux. Un village, certes, mais un grand !

Bourgogne Hautes-Côtes de Nuits. Et un petit coup de blanc pour finir ! Vingt trois ares de pinot blanc qui deviennent 1800 cols d’un jus jaune franc, moiré de vert, ample, frais et gras à la fois, aux fragrances florales, à la belle texture, dont la souplesse en bouche n’exclut pas la vigueur.

« Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années… » Corneille dixit ?

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