A DANSER SUR LE MERGOUM …
Le mergoum de La De.
Illustration Brigitte de Lanfranchi, texte Christian Bétourné – ©Tous droits réservés.
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Orgie d’orgeat qui coule, grasse, goûteuse, partagée,
Hors piste, je glisse, c’est pas triste, neige fondue,
La fleur écartelée, tourmentée, barattée,
Je tressaille, tu m’assailles, ça grouille si dru,
Et ça roule, suis maboule, en foule, sous ton pull,
C’est la fièvre des samedis noirs. Perdue là-haut,
Le vent souffle, lune blême, hibou noir, tu hulules,
Et moi je, suis tout bleu, cœur troué, très barjo,
Marjolaine ma sirène, tu me laisses sans ma laisse,
Sous tes fesses de drôlesse, le coussin bleu fané,
Vieilles années, papiers froissés, amours niées,
Croisés défaits, paniers percés, lances brisées,
Le soleil range toutes ses franges de soie mâchée.
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Âmes bien nées, qui jadis étiez si complices …
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Et les eaux chaudes coulent sur le verre dépoli,
Hammam de fortune où tu t’es accroupie,
Lune pleine de reine à la raie distendue,
Les doigts courent, massent et pourfendent, jusques au cul
Oeil, fragile ose, amours anciennes, amours perdues.
Sous la tente naguère, sanglant, le flanc crevé,
Armure défaite, allongé. Seuls ses pieds,
Dansent pour lui. Sous le voile les yeux blonds pâles,
L’ont à jamais cloué. Moribond souviens t-en à jamais,
Citrine, l’oeil doré aux longs cils frangés, pour toujours,
Fou d’amour, t’attendre, siècles maudits, les vies,
De trop, toujours, désespoirs, fourreaux en lambeaux,
Tant d’autres ont pu, accrochés comme des pieuvres.
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Rose des sables, Venise que j’ai tant attendue …
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Tu me serres, m’enserres, tu ne veux plus te perdre,
A danser sur le mergoum quand ma vie s’en va,
Sous les remparts d’Antioche, une lame a perlé,
Une goutte avalée par les sables épais,
Quand tu m’as regardé, une larme a percé,
Sous les dattiers, oasis oubliés, là-bas.
Ta bouche de verre pilé, tes dents de nouvelle née,
Tes mains lavent mon corps de tes désirs pervers,
De cette vie brisée, des souvenirs de guerre,
Sous la douche plus brûlante que la flèche à la rose,
Éperdus à crier, nos pieds et poings liés,
L’abeille sur la fleur, toutes paupières closes,
Mange la langue mangue, boit à la source éclose.
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Cheveux longs, éventail doux, tu caresses mon cou …
Cent vies invitées à danser sur ce margoum de lumière …
Un mergoum vitrail d’une cathédrale de vent fou. Réminiscences et futurs enlacés sur les fils colorés, danser sur ce mergoum, danser à user la trame!
Emouvant. Il a fallu le lire plusieurs fois pour déméler les fils, les agencer, créer le margoum. J’ai adoré, le poème et ce dessin tellement lumineux!
La rencontre des âmes d’Orient et d’Occident sur un tapis en fils de soleil !