Littinéraires viniques » Christian Bétourné

QU’ELLE EST BONNE LA MARTINE…

Jan Steen. La mangeuse d’huîtres.

 Saint Jean des Monts sur Côte Vendéenne, en ce début Novembre 2010 de la fin du monde. Sur les 250 kilomètres qui séparent Cognac de cette Chouannerie, nombre d’Arches de Noé tentent de se construire, régulièrement démontées par les bouffades enragées d’un vent tempétueux. Agrippé comme Agrippine au poignard de Néron, soudé au volant comme huître à son rocher, les quadriceps en fusion et les bras noués, je cherche mon chemin de paradis, entre les vagues hurlantes des eaux, catapultées d’un ciel en sinistrôse profonde, par un Éole frénétique. Au bout de l’enfer liquide, le sourire chaleureux d’un homme à La Pipette curieuse qui en vaut quatre, accoudé, du bout de son sourire barbu, au bar de bois nature d’un caviste fêlé, qui règne démocratiquement sur son Carlina de Chai. Il fait bon vivre, rire et boire entre les murs de ce lieu convivial, beaucoup moins foutraque qu’il n’y semble au premier abord. Plus un espace libre sur les murs, que tapissent à la va-comme-j’te-pousse, les souvenirs sur planche de caisse des hôtes de passage, la collection de boites de sardines du patron, des dessins d’enfant, des bouteilles vides en groupes ou en pagaille, les cailloux du Petit Poucet semés par-ci par-là, et foultitude de petites choses de toutes provenances…, un étrange foutoir surréaliste et chaleureux, qui vous console d’avoir bravé Zeus en bagarre, avec Neptune en furie.

Derrière le bar, en salle, à la cave, en cuisine, partout à la fois et en même temps, Philronlepatrippe semble mener une existence stroboscopique. Entre ses mains rapides, les bouchons volent comme abeilles de liège. Sur le bar, les bouteilles, serrées les unes contre les autres, orphelines craintives, se tiennent mutuellement frais, et suent par-dessus leur verre tant elles angoissent d’être vidées trop vite, ce qui définitivement les priveraient des longs regards amoureux, que leurs jettent la brochette mal cuite, de picoleux impatients accrochés au zinc.

La soirée, vouée aux méléagrines d’origines diverses, est – Novembre oblige – intitulée «14-10-huîtres»… Plus précisément douze variétés d’Ostrea sont proposées deux par deux, soit vingt quatre mollusques salés à téter, à slurper, à gober bruyamment, à ramasser, parfois lourdement chus sur le pantalon, comme glaviots glaireux. Bref, à déguster avec des mines de patte-pelu gourmand. Autour des reines du soir, beurres AOC, du doux au demi-sel, en passant par le délicieux beurre aux algues. Histoire de pousser les molasses au-delà du canal de la luette, douze vins différents de toutes régions, mais tous blancs of course (les Vendéens ne sont pas Parigots branchouilles qui assassinent ces pauvres bébêtes sans défense à grandes lampées de Bordeaux sévèrement douellés ), ont été choisis pour les exalter. Douze vins donc, parmi lesquels le «Clos des Rouliers» 2008 de Richard Leroy me séduit à nouveau, quand il envoûte de son Chenin longuement élégant, la chair pâmée de la «Prat ar Coum» Bretonne. Mais entre toutes ces belles offertes, c’est sans conteste pour l’Irlandaise, la «Muirgen» qui finit son élevage à Cancale, que sonnent les cornemuses de la victoire. Il vous faudrait la décoller délicatement de sa coquille, puis verser une giclée blonde du «Phénix» 2009 de Guy Bussière dans son écrin, enfin vous mettre le tout en bouche, pour comprendre combien la finesse, le croquant, la douceur, la longueur de la chair, fouettée par ce «modeste» Melon du Val de Saône, vous caresse longuement le palais. D’autres vins, dont nombre vouent un culte mérité à Demeter la Grecque agricole, réussissent leurs épousailles avec les bivalves. Le Muscadet 2009  “La Bohème” de Marc Pesnot, le Sancerre  2008 de Gérard Boulay envoient, pour l’un, au septième ciel, le sarcoplasme iodé de la «Vendée Nord Ouest pleine mer», pour le second, c’est le pied tendre de la «Utah Beach» Normande qui enfle de plaisir. Tout est là, jouissance et volupté en bouche…

Mais le temps s’écoule et la parenthèse se referme. Le bitume succède à la grève venteuse, le vent persiste mais les eaux restent au coeur des cieux lourds. Au platitudes bocagères Vendéennes succèdent les reliefs doux de la Saintonge, puis les plaines et coteaux de la Charente, jaunis ou rougis par les vignes, qu’enflamme encore l’automne. Céans, l’eau, abondament bue, me nettoie les cellules quelque peu engorgées par les jus blancs, les beurres et les corps croquants des belles de mer. Mais ce jour, après deux jours, me revient l’envie d’un tour en Macônnais, en Chardonnay gourmand. Là-bas, entre les roches célèbres qui se font face, non loin du Val Lamartinien, à Uchizy, un peu plus au nord le climat «La Martine». Un vin de poète? Peut-être, mais pas Lamartinien pour un sou…

La robe de La Martine est pâle, rehaussée d’ors lumineux.

Les parfums de Martine montent au nez, bien plus mûrs qu’elle. De son corsage, qui rebondit au rythme de sa course innocente, s’échappent en volutes chaudes, des odeurs de petits matins de pâtisserie, de paniers de fruits jaunes et dorés à l’étal d’un marché d’été, de bocaux de fruits confits, de boites de Calissons d’Aix. Un bâton de réglisse retient la cascade blonde de ses cheveux. Les fleurs des chèvrefeuilles s’écartent sur son passage et ajoutent à sa trace odorante… C’est un bonheur de la suivre du bout du nez.

La suite de ce Mâcon-Uchizy, en bouche, est plus délicate….Je ne m’y risquerais pas et dirais succinctement qu’elle est est à l’avenant, une gourmandise mais avec de la matière, un jus délicieux que tend et rehausse une finale délicieusement fraîche. Martine est un bonbon dodu que l’on aime à croquer, qui gicle sensuellement entre les dents, pour vous prendre langue et palais, de toutes ses rondeurs généreuses et fruitées. Les 2006 des “Bret Brothers” du Domaine de la Soufrandière sont, pour ceux que j’ai goûtés jusqu’à présent, la gloire d’un millésime bien maîtrisé.

Ce que qui précède est pure fiction, résultat d’une récente nuit trouée par une insomnie blafarde. Seuls sont réels les mollusques et les vins cités.

EFEMOTILEECONE.

LES FURETEURS DES HEURES INDUES…

James Ensor. Foule.

Oui, la vie d’un pauvre Blog perdu dans les circonvolutions anarchiques et hasardeuses de ce conglomérat de vertu, de vice – de truismes sans cesse assénés et de fulgurances aigües – sur les fils de cette galaxie arachnéenne qui se déploie sans cesse, n’est pas chose aisée. Des milliards de doigts courent sur les claviers tandis que Microsoft et Google, réseaux en tous genres, tyrans plus réels que virtuels, règnent comme en République bananière, filtrent nos interrogations, et distillent leurs réponses. A chaque question posée, ils proposent millions de plus ou moins faux choix, dans un grand n’importe quoi, comme il est de «bon ton» – plus à la mode qu’en voie de disparition – en ces temps de bascule erratique… Changement de siècle, fin de cycle, involution ou révolution?

C’est ainsi qu’au fil du temps, se posent sur mes textes – si «chiants et difficiles, que tu causes avec trop de mots de merde…» selon quelques uns (ce qui me conforte dans mon obstination butée à écrire ce que je veux sur mon Blog, à caresser la langue du bout de ma plume, à lui dire que je l’aime, qu’elle est belle, subtile et jouissive, bien plus que la plus expertes des amantes! Que ceux qui n’ont jamais connu d’orgasme sémantiques aillent aux Putes) – des visiteurs égarés, à la recherche d’informations souvent fessues, biteuses, crades, parfois poétiques, parfois maladroites, malsaines extrêmement, involontairement amusantes aussi. De la poésie qui roule dans les éclairs électriques, des incandescences anonymes, des misères de solitudes déchirantes, des pulsions glauques, des tendresses maladroites, le monde dans sa diversité, ses espoirs, ses détresses. Partout, jadis, maintenant, encore, toujours (?) dans la cour des miracles, au coin de ma rue, la rudesse apparemment injuste de la vie exerce sa cruauté aveugle? A moins que ne règne la Loi du Karma? Affaire d’intuition, d’intelligence, de croyance? Saturés, obscurcis, binaires que nous sommes, dans l’implacable jungle de ce monde de matière si dense, englué dans la course effrénée à la consommation sans fin, grande Déesse qu’adorent nos économistes en délire. En toutes circonstances, il faut “profiter” à l’excès, consommer à vomir, vénérer le veau d’or et ses prêtres milliardaires maîtres du monde, de ce monde, de notre monde déliquescent en voie d’affaissement.

Mais je m’efface devant mes visiteurs, mes égarés qui ouvrent sans doute des yeux étonnés, tels biches affolées sous les assauts brutaux des cerfs en rut, lorsqu’ils atterrissent entre les méandres abscons (mais pas plus qu’eux) de mes phrases par trop alambiquées… Mais à Cognac, eaux de vie obligent!

“S’essuyer aux rideaux.

Pipette de caviste.

Abbaye de Baumgarten.

Pierre semi-précieuse Bojo.

Cap Gris Nez, bombe.

Mozart Vin.

Jean Marie Guffens, l’homme qui parle aux bouchons.

Guffens, oreilles, bouchon.

Le château de l’iles d’yeux.

Baise dans la jungle.

Bras engourdis, cœur cocaïne. *

Jean Marie Guffens, l’homme qui souffle dans l’oreille des bouchons.

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Voillot absinthe.

Assiette barbotine, poire inconnu.

Suce et aval.

Artisan de lampadaire à Chinon.

Christine Dieu.

Cheval copac du cœur.

Mont des avaloire, la pierre au loup.

Glycérolés vin.

Le pelage blond vénitien de la hyène. *

Carresses intimes entre homme.

La tatitine explication.

Le massacre des moines de Thibarine.

Lustau Almacenista.

Lorsque l’eau de vie a le même goût que l’eau de pluie, ton œil livide ou a demi plein, émet sa douce lueur et guide mes pas. *

L’origine de la guerre de Trois.

Vin de pays du lion rose des embruns.

Grosses couilles.

Jeté de lit boutis bleu.

Lèvres en feu.

Vierge au pied de la croie arcabas.

Le nom bojo et le pouvoir.

Portrait d’une polychromie abstraite.

Couleur chaude levé du soleil.

Quand le blog cul bas et lourd, pèse comme un couvercle. *

Dufy, eau de vie, esprit le fleuret du fruit.

Front de Meursault gonflait.

Le relief sur la bourgogne.

Mon chien a sa truffe chaude qui feure. *

Femme de couleurs et gros sein.

Tâche cerise doigt.

Tsiba egor.

Analyse de sang pilé.

Vivre nu au soleil.

Aiguilles vibrant de maçonnerie.

Voir femme à poils.

Mur noir gris et rouge.

Injures en patois.

Spelling.

Bavard aligoté 2008. *

Comment détruire les petites bètes blanches qui envahisses les fleurs de mon orchidé.

Douleur abdominale à droite.

Le parchemin de vérité.

Humeurs nocturnes.

La pipette des caves.

Clapton tire la quintessence des iennes. *

Douleur, Marie, Siméon, grégorien.

Femme défoncée par chien.

Pose acide au vinaigre.

Champagne garand cotie diaphane.

Substance aide faire l’amour.

Que gagne un artiste peintre.

Laine vierge.

Pierre angélique striptease.

Crème de noyaux cabanes.

Lunette persienne a montélimar.

Voir la pépette de ladi gag.*”

Et pour conclure, un summum de poésie conceptuelle…

“La douceur infinie de ces lèvres et un peu plus faim blancs de l’ivoire a inventé la vérité d’un tapis humide aussi simple que la vérité!”

Me voici donc débarrassé de ces dépots involontaires, de ces alluvions de mots dans leur exacte orthographe, échoués sur ma p(l)age souvent blanche… Merci à Mercure d’avoir guidé avec humour ces égarés, d’avoir donné aux lecteurs de ce billet la patience et/ou le courage d’avoir bu la coupe jusqu’à la lie de la lettre.

* Mes préférées…

EALMOLEZTIENCOPAIXNE.

L’ARSOUILLE D’ARSURES FAIT SON CHARDONNAY…

Jean Fouquet. Agnès Sorel.

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Dire que j’aime le Chardonnay quand il s’épanouit sous les climats septentrionaux, oui je le dis souvent. Beaucoup de plaisir à me promener régulièrement au long des flacons frais et fruités de Jean Rijckaert, le Flamand qui fait vin au lieu de bière. Pourtant, longtemps ce cépage fut pour moi Bourguignon, sans que jamais je ne m’interroge sur ses expressions d’Outre-Burgondie. Puis le temps passa et me déniaisa, il était temps… A vrai dire le temps qui passe vous déniaise tout au long de la vie, si vous n’êtes ni sourd, ni aveugle et savez lire les signes en écoutant le vent.

A ce jour, j’avoue deux plaisirs proches et différents à la fois, selon que le raisin mûrisse aux alentours des Abbayes que tenaient les belles Abbesses à poigne ferme, qu’elles soient de Bourgogne ou du Jura. Les conjugaisons et déclinaisons méditerranéennes, pesantes souvent, ne me satisfont pas jusqu’à lors. Quant aux Chardonnay du «Monde dit Nouveau», je ne les fréquente pas assez pour oser émettre une opinion… Les ceusses que j’ai croisés m’ont repeint la bouche mais ne m’ont pas pris le cœur.

Or donc me voici face à cette bouteille d’Arbois 2005 de Jacques Puffeney, bon faiseur s’il en est, bâtie comme un flacon, intimidante comme le regard d’une femme dans une maison de librairie. Car c’est là qu’elles se regardent au fond de leur sexe, se retrouvent, se sourient, s’acceptent, s’aiment ou se détestent. Oui là, entre les piles, entre les livres, entre les pages qu’elles frôlent d’un doigt humide, le front plissé, le regard perdu aux confins de mondes étranges et familiers, à la lisière des sensibilités complices. Ah, le regard d’une femme qui se retrouve, alors qu’elle se croyait secrète, entre les lignes d’une converse, dans la chaleur douce d’une bibliothèque obscure… Comme une lumière noire qui perce un soleil.

Bon et le Puffeney dans tout ça???

Un vin à la robe blonde qui devrait plaire à cette femme qui sourit aux illusions du monde, susurre en moi le macho qui ne dort que d’une hormone. Pourquoi, je ne sais pas, mais le pressens. Claire et lumineuse donc la robe. Oui, lumière d’or tendre, mouvante comme une peau mâte et souple…

Les pommes cuites et piquées de noisettes justes grillées… d’emblée, chaudes au sortir du four. Voilà qui plairait aussi à nos mies qui jamais n’ont su résister à la chair croquante et sucrée de ce fruit de paradis charnu. Des notes exotiques de curry, mêlées de pâtisseries chaudes, ajoutent à la séduction de ce charmant – jusqu’à la dernière fragrance – Chardonnay. Au bout de l’inspiration, comme une touche de cannelle fumée qui parachève.

Certe,s il ne faudrait pas tomber dans le dithyrambe en osant une comparaison avec un grand blanc de Bourgogne ou d’Afrique du Sud (Sic). Non, non, je m’accroche aux parois hottentotes du verre pour ne pas choir comme un amateur qui aurait abusé des plaisirs de la chair du vin… Gras et fraîcheur, alliés à une toute petite sucrosité quelque peu épicée marquent l’entrée en bouche d’une, ma foi, bien belle matière… De gourmands fruits jaunes, piqués d’épices, cannelle, poivre et muscade, s’épanouissent, aguichent langue et palais de leurs séductions douces. Un peu de menthe peut être aussi. La finale n’est que moyenne, et laisse en bouche comme une idée de tanins…

Je persiste et signe, Chardonnay en Jura, en de bonnes mains, fait de beaux vins.

Mais où sont les noix? Dans l’arbre du verger, bien sûr…

EMAMODAETIMERÊCOVENE.

LE VINÃS du VILAIN…

J’étais là, plutôt calme, paisible mais concerné et réciproquement, lorsque que la petite enveloppe que tous les joueurs de clavier – pas toujours tempéré –  connaissent, s’afficha au bas mon écran… Je la vis d’un œil distrait, occupé que j’étais à enrichir la littérature mondiale non aseptisée – douce maîtresse fidèle (ça ne court pas les rues) – que je m’enorgueillis de servir. Oui, de ma plume tendrement acérée, je caressais un texte de petite façon. Mes doigts couraient sur le clavier comme ceux, déliés, d’un petit Mozart de quartier, halluciné. Cindy Lauper me berçait de sa voix rauquement chaude, revisitant un vieux blues intemporel qu’elle portait à l’incandescence… Mes sens à moi, les miens «mine», qui ne sont même plus des souvenirs tant le grand âge les a polis, étaient paisibles, lovés, endormis, anesthésiés… Moi, lui, le jadis conquérant que les éléphants d’Hannibal avaient pris comme modèle, lui que l’on surnommait il y a des lustres l’Anaconda des Carpates, reposait endormi comme un spaghetti trop cuit, au creux solitaire de mon, son  jeans trop serré. Mais que sont devenues les belles, aujourd’hui endormies, qui râlaient extasiées entre mes bras musculeux, les hanches broyées sous mes cuisses de Charolais, la gorge râpée à hurler leur bonheur de vivre sous mon joug audacieux et impitoyable? Il était tard, la nuit silencieuse déroulait son taffetas de jais. Cindy se faisait brûler les cordes et susurrait un «Early in the mornin’» tendrement souligné par la voix de cajou du vieux B.B King. La «Lucille» du vieux Lion montrait ses dents de dentelle sonore, en riffs délicatement espiègles. Tout pour être bien, en harmonie avec les vibrations subtiles du temps suspendu de cette nuit, profonde comme une gorge de velours funéraire.

C’est alors que l’inénarrable Fausse Bonhommie palpita à son tour au bas très plat de mon miroir à pixels. Agacé par ces manifestations parasites, je laissai mon ouvrage en plein tissage et m’enquis, pressé d’en finir pour mieux y retourner. D’un clic rageur j’ouvris FB, découvrant ainsi qu’une charmante Argentine (parmi les innombrables groupies qui virtuellement m’assaillent jours et nuits) me proposait d’aller visiter sa pampa broussailleuse. D’ordinaire je néglige, or là, va savoir pourquoi (encore que la photo de la belle, son regard surtout..!) je la mis, prudemment, de côté. Je décachetai ensuite l’enveloppe virtuelle pour me voir proposer le VdV#30 *. Je lus en diagonale, immédiatement interloqué et très nettement, comment dire… revigoré par la prose suggestive des Bulots à Deux Têtes. Couillus les HEF-BAISE’S Brothers, me dis-je in petto! En voilà un sujet motivant qui va faire palpiter le Web morne plaine et les toiles d’araignées qui envahissent d’aucuns. Toi le premier vieux gars somnolent, me redis-je in duo petto. Par un miracle (donc inexplicable) insensé, les deux informations quasi simultanées n’en firent qu’une, s’emboîtant comme les pièces d’un puzzle potentiellement ardent. Ah, les ressources de… l’esprit humain sont insondables. Un tel sens de la synthèse convergente devrait à terme, le jour où l’homme se sera débarrassé de ses traders (bizarre j’avais pensé «travers»!) et autres avides marchands de moulins à vents, hisser l’Humanité au sommet de l’échelle de la Tolérance et de la Fraternité. Je ricanai un long moment et proprement interloqué, je m’agenouillai devant tant de sagacité de moi-même.

Banco me dis-je in trio petto, y’a pas à hésiter, aux VdV#30 tu te dois de fournir et du bon! Rassuré par la consultation de mon compte en banque, je contactai la Chica qui me dit se prénommer Passionnata et lui annonçai mon arrivée par le premier vol. Là-bas me dis-je in-quarto petto, si t’as bien senti le coup, ce sera feu d’artifice et viande charnue à gogo. Bon pour le moral et les VdV#30 réunis! Ah là là, me dis-je requinqué in quéquetetto petto, que ne ferais-je pour honorer le vin des Bulots… en attendant mieux.

Confortablement assis mais à-moitié endormi, je survole les Îles Malouines et me dis in sex-toto petto que ça commence à sentir bon les chevauchées Patagonnes. Ha, caracoler à cru, accroché à la crinière humide d’une cavale sauvage! Les éperons aiguisés, la touffe sous le vent des cimes, les ongles enfoncés dans le gras de la bête non sulfitée, un régal Nature-Bio et assurément dynamique! Au dessus de ma tête, dans mon bagage-cabine en bambou de Sumatra mélaminé, étanchéifié à l’extrait de Bonobo, repose une belle, amoureusement emmaillotée par mes soins. Une très charmante Castillane à la pulpe tendre, fraîche, humide et généreuse sans doute? Une Señora patiemment élevée plus de six ans par Don Rafael López de Heredia y Landeta en Rioiia Alta dans la bonne ville de Haro. De Tempranillo y Garnacha y Grociano y Mazuelo vêtue, la Graciosa du millésime 2000, devrait aider à donner, à l’instant où le monde bascule, ce qu’il faut de folie pour conquérir la gaucha

De Buenos Aires à Paraná dans la province d’Entre-rios, cinq cents kilométros vite franchis, juste le temps d’une saillie de puce dont l’hôtesse de l’aérodyne à hélices fait les frais dans les courants d’air des Andes (?), coincés que nous fûmes (elle surtout) comme deux embryons de loutres enragées dans les toilettes façon utérus de souris, et hop, me voici débarqué, charmeur défraîchi, frétillant, requinqué et prêt à tout, voire plus. Au sortir de l’aéroport, au loin, à contrejour, nimbée par le soleil couchant, ELLE¿ Vêtue au chausse- pied d’une robe rouge sang de taureau, la lèvre éruptive, l’œil noir profond comme un lac volcanique, elle se tient droite, fièrement, la main appuyée sur ses reins cambrés. A ses côtés, une petite boulotte, raide, courte et lourde du bas, taillée dans une andésite de l’Aconcagua et dont les hautes pommettes parlent l’indien des hauts plateaux, s’accroche, mâchoires et doigts serrés, au licol d’un Criollo à la robe Isabelle, aussi nerveux qu’elle semble placide. A sa taille, enroulées et paisibles, des boléadoras se balancent. Une onde glacée, sans raison apparente, me traverse furtivement le corps. La vision de l’Abbé Faria dans son cachot humide de l’île d’If l’accompagne, et je regrette le temps d’un battement de neurone, de ne pas être à ses côtés…

Passionnata me reluque l’œil mi-clos comme une maxi maquimignonne experte. Sous ses longs cils épais, une lueur corrosive sourd comme la lave bouillonnante d’un volcan éructant. «Hola que tal¿», m’assourdit-elle d’une voix rogommeuse, « Te presento mi amiga Chupa». La naine épaisse qui l’accompagne ne bouge pas d’un centimètre, caressant d’un doigt court l’une de ses bolas. Me vient l’envie subite de la planter à coups de massue sur l’Île de Pâques! Chupita s’ébroue subitement et montre d’un geste avorté, deux autres Criollos à l’arrière plan. Je crois comprendre que le Pie au regard torve m’est destiné tandis que la robe alezane du troisième, dont les muscles tressaillent sous la peau tendue de veines épaisses, porte sur le dos une selle de cuir ouvragé au pommeau saillant comme un épais bouton, faite pour protéger la culasse tubéreuse de la flamboyante Argentine moulée dans son fourreau écarlate. Dans mon esprit surchauffé plane le spectre de l’AVC foudroyant. In septuo petto, je lacère de mes dents acuminées la levantine diaphane tendue à craquer sur les hanches épanouies de l’odalisque. La vision des globes charneux jaillissant du bombasin, délivrés de leur prison soyeuse, et dans la fente desquels frise un andain compacté qui s’ouvre sur une luxuriante vallée – il me faut l’avouer – m’épouvante un peu! Dieu ne me sera d’aucun secours, puisse Éros m’inspirer, que le bon père Sigmund me protège de cette polymorphe vorace!

«¡ Vamos changuito! Ahorita mismo te llevo a la pampa, que alli te tengo preparado un asado de ternero al palo. Buena carne para ti, con  musica de Carlos Gardel. «¡ Ay! Francesesito querido!». «¡ Puta Madre!» m’entends-je expirer in octuo petto, «¡ Qué caliente  va estar esto!» Le long de mes muscles lombaires tendus à l’extrême, une sueur passablement hormonée qui me fait sourire nerveusement, se met à couler à grands flots…

Le vent souffle, en courtes rafales hargneuses, sous le belombra décharné dont les branches courtes et bistournées se découpent sur le ciel à l’orage. Les criollos tondent avec méthode l’herbe des pampas comme des coiffeurs tétrapodes. Le crissement des bromes dactylées, broyées sous leurs mâchelières épaisses, résonne – atonal – sur la basse continue que tient l’aquilon. Sur les piquets de bois brut, des quarts de bœufs rôtissent. Les graisses butyreuses gonflent, grésillent et éclatent en longs jets évocateurs. La vue de ces axonges brûlantes que la chaleur façonne, fascine Passionnata dont les doigts raidis massent convulsivement les chairs ardentes de ses tétasses aux trayons turgescents. D’un mouvement brusque des hanches, elle se tourne vers moi. Ses mamelles ballotent et la lave coruscante de son regard hypnotique me foudroie, comme un moineau anémique sur une ligne haute tension! Je tombe à la renverse, littéralement sidéré. Ma conscience vacille. Au dessus de moi, la pélasgique amazone déchire, d’un geste convulsif, la fine pelure tendue à en culer, de son angusticlave dégoulinante de désir glouton et s’enduit la poitrine de chimichurri gluant. «¡¡¡ Cóme me !!!» bave t-elle!  Mais comment vais-je pouvoir besogner cette Papagena barbare avec ma petite Flûte Enchantée me demandé-je, in nonuo petto, avant de m’évanouir pour de bon…

La chaleur de la lampe de bureau renversée sur mon bras gauche m’a roussi les poils et m’a rosi la peau. Ma tête, renversée sur mon bras droit est douloureuse, mes cervicales, raidies par ce sommeil comateux, craquent quand je me relève, hébété. La bouteille de Viña Tondonia, patiente, n’a pas bougé. Imperturbable comme une duègne blasée, elle attend que je veuille bien l’honorer. Carafée ce matin, elle repose et se gave d’air dans son cristal. Les reflets de la lampe l’irradient et sa robe de rubis patiné joue avec la lumière chaude. Il est quatre heures du mat, six heures de sopor visqueux me dis-je in dixtuo petto. Étrangement j’ai soif de vin frais et d’air doux. D’odeurs subtiles et fragiles aussi. Le vin m’exauce. Fruits rouges sous la rosée du matin, cerise mûre, pivoine fragile au sortir d’une fine pluie d’été, autant de fragrances vibrantes que rehaussent et magnifient des parfums de vieux cuir, de sous bois au matin d’un automne roux, de chocolat noir aussi et de tabac. Un nez complexe, fondu, élégant, racé. En un mot, DISTINGUÉ.

Le fumet presque disparu d’un taureau au bout de sa volte, pourtant subsiste en tête du bouquet…

Est-ce cela, amplifié par ce texte à écrire pour les VdV#30, qui m’a assommé? Peu importe désormais, la bouche m’appelle. Ai-je pu un jour avoir aussi soif de finesse, de douceur et de tendresse de vin qu’à l’instant, me suis-je une dernière fois esclaffé… in sesquicentuo petto! En préliminaire, mes lèvres reçoivent l’offrande, tout d’abord demi corps, de ce Rioja d’altitude. Fluidité de la matière et fraîcheur me caressent les petites éminences coniques qui saillent sur ma langue papilleuse en prière. Puis le demi-corps se fait chair pulpeuse et fondante qui libère un orgasme de flots fruités rouges, tendres et mûrs comme une brassée goûteuse de bécots goulus. Ça roule en bouche et palais, ça serpentine autour de la langue, ça enflamme le corps et l’âme. A l’avalée, le vin s’étire comme la belle au réveil qui suçote le chocolat amer qui enduirait un pruneau… La finale pulse longtemps dans ma gorge apaisée et dépose sur mes muqueuses à vif, ses imperceptibles tanins polis.

Ne cherchez pas la suite de cette histoire ébauchée dans vos souvenirs, dans votre présent non plus, et moins encore dans votre avenir…

Elle m’appartient.

* Vendredis du Vin N° 30.

EVIVAMOARGENTICOTINANE.

LA SUPPLIQUE A SUPPLY…

Gérard David. Ange de l’Annonciation.

 Oui…pour les chineurs de perles noires surtout. Tant pis pour 2011.

Concélébrons à nouveau et avant tous (c’est ça le chasseur de tendance) cette année encore proche qui voit Monsieur Eric vendanger le «Mourvèdre des Crouzets» 2007. J’ai eu beau scruter Gogol Earth en long en large et en relief, point de parcelle perdue sur les flancs du Baudile à me mettre sous les yeux. Appelé à la rescousse Géo l’hexagonal ne fit pas mieux.

Les «Commentateurs» étant immodérément issus du croisement hasardeux entre le Phaseolus communis Pritzel et le Phaseolus compressus **, je remercie à genoux le père fondateur qui me donna vie. Merci à toi, Ô César des mondes liquides, d’avoir permis à mes papilles curieuses de goûter cette bénédiction faite vin. Oui, sans toi ma vie eût été toute autre et la fadeur convenue des breuvages encensés par les prescripteurs installés, aurait sinistrement continué à réjouir mes tristes habitudes d’amateur ronronnant.

Voilà c’est fait. Si après ça je me fais virer, c’est à désespérer de vouloir jouer au Jack Lang des courtisans virtuels…

Or donc revenons à ce génial Mourvèdre.

Toujours et encore et pourvu que ça dure. Je m’en régale déjà en regardant l’œil humide de la bouteille opaque. De la bonne grosse boutanche à verre épais et large cul qui vous remplit la main d’un honnête homme. Lourde comme les seins d’Andréa Ferréol dans «La Grande Bouffe», mais en plus ferme… Un vin comme ça, jeune et de Baudile (Vin de Pays du Mont…) issu, va falloir l’aérer, le détendre, l’assouplir, l’apprivoiser, faute de quoi il va me faire son gros bourru boudeur, cul serré et tanins hérissés. Casanova devait être un fin dégustateur me dis-je, souriant, vieux matois, aux souvenirs exquis d’anciennes joutes et de récentes aussi, VdV oblige!!!

Vous allez vous dire, j’en suis sûr : «Il déraille encore plus que dab le vioque!!!(vocable emprunté au vocabulaire, d’ordinaire pauvre, du lecteur ulcéré). On lui a pas donné sa tisane et son bromure hier soir ou quoi!! C’est pas qu’il nous ferait une poussée hormonale éphémère et tardive??? Va encore falloir gober ses hallucinations, ses états d’âme, ses radotages, ses idées fixes???».

BEN OUI, il a eu fallu!!!

D’un coup sec et viril, à l’ancienne, le col du flacon bien serré entre les cuisses, j’attaque le bouchon. Ça couine un peu sous le sommelier. Normal c’est jeune, mais ça capitule de suite. Ça fait un joli «glop». sonore, net, sans chichi. Faut dire que c’est pas le genre vieille chochotte qu’a bourlingué dans tous les caboulots d’Amsterdam, mal conservée, qu’a eu chaud plus d’une fois et qui rend son bouchon quasi délité, dans un borborygme humide, comme une Bretonne qu’attend son marin de mari, plein hiver sur les quais de Paimpol *. Non, c’est un beau bouchon, cœur de liège, un vrai géant qui pète clair et qu’était encore bien au chaud dans la poche de l’Eric y’a pas si longtemps. Puis je verse dans le Spiegelau ventru un beau jus d’un rubis foncé, au cœur noir comme une haleine de dragon. Deux tours de poignet et le vin tapisse, une seconde immobile, les parois du verre avant que de se répandre en larmes grasses tout autour du disque. La pierre précieuse, aux reflets violacés, brille sous la lumière douce d’une lampe de bureau. C’est que ces jours-ci le soleil est en Afrique…

Sous le nez, des jardins. Dans les jardins, profusion de fruits rouges gorgés de jus. La rosée caresse la terre du Mont qui exhale ses senteurs humides, ses parfums de bois rares et les effluves épicées des poivriers avoisinants. Les épices douces s’enroulent autour d’une pointe de cannelle, d’un soupçon de vanille, d’un fragment de bois de réglisse et d’une goutte de jus de rôti grillé. Mélange des genres…

Et j’ai le nez ravi! Poussière sur le plumeau, le sentiment de humer la complexité harmonieuse d’une crème de liqueur. Usant de stratagèmes, je retarde l’instant de la rencontre. Dieu qu’attendre est exaltant. Comme il est doux d’avoir le pouvoir de se freiner. Au bout de deux jours quand même Chérie, je peux??? Oui viens, me répond dans un zéphyr odorant, le vin dont la surface ondoie sous le souffle de mon impatience. Mais qu’il est souple ce jus qui se donne tout en se retenant. C’est gras, tendre et serré à la fois. Une pelure de tanins mûrs et délicieux, un chocolat Grand Cru en bouche, fin, subtil, équilibré bien que du Sud (comme quoi y’en a qui savent faire…). La puissance est là cependant, contenue et s’exprime dans le registre de la subtilité plutôt que dans celui de l’esbroufe. En finale, le vin s’allonge indécent, en toute fraîcheur et installe sa réglisse épicée sur mes papilles turgescentes qui n’en finissent pas d’exploser…

14°8 parfaitement maîtrisés.

A la relecture je me dis que cette matière sauvage aurait tout aussi pu donner un bloc monolithique, indigeste, lourd et alcooleux. Il fallait savoir la lire et la dompter. Certes le terroir, notion dont nous nous gargarisons souvent, est importante sinon essentielle, mais sans la patte du vigneron…

Alors Monsieur Supply-Royer, je vous en supplie, ne changez rien à vos manières d’être et de faire, même pas les prix. Dix euros chez un caviste en ligne.

* Vous avez de la chance, je la vois debout, sinon…

** Le premier qui trouve gagne un Gaffiot hors d’usage…

 

EBEAUMODEALATIBAUCODILLENE.

CE BOIS DONT ON FAIT DES MERVEILLES…

  Juste avant le Bal des Debs…

 

 Ah «Le petit bois derrière chez moi», la jolie comptine…

 

«Derriere chez moi
Savez vous quoi qu’y n’y a
Derriere chez moi
Savez vous quoi qu’y n’y a
Ya un bois
Le plus joli des bois
Petit bois derriere chez moi
et tralonlalonlere tralonlalonla et tralonlalonlere tralonla
Et dans ce bois
Savez vous quoi qu’y n’y a
Et dans ce bois
Savez vous quoi qu’y n’y a
Ya une godasse
La plus jolie des godasses
La godasse dans le bois
Petit bois derriere chez moi
et tralonlalonlere tralonlalonla et tralonlalonlere tralonla
Dans cette godasse
Savez vous quoi qu’y n’y a
Dans cette godasse
Savez vous quoi qu’y n’y a
Ya un peneu
Le plus joli des peneus(x)
Le peneu dans la godasse
La godasse dans le bois
Petit bois derriere chez moi
et tralonlalonlere tralonlalonla et tralonlalonlere tralonla
Dans ce peneu
Savez vous quoi qu’y n’y a
Dans ce peneu
Savez vous quoi qu’y n’y a
Ya un almanach
Le plus joli des n’almanach
n’almanach dans le peneu
Le peneu dans la godasse
La godasse dans le bois
Petit bois derriere chez moi
et tralonlalonlere tralonlalonla et tralonlalonlere tralonla
(parlé) Ya tout ça derriere chez moi?
(parlé) c’est pas possible
Dans le n’almanach
Savez vous quoi qu’y n’y a
Dans le n’almanach
Savez vous quoi qu’y n’y a
Ya un sparadrap
Le plus joli des sparadraps
Sparadrap dans le n’almanach
n’almanach dans le peneu
Le peneu dans la godasse
La godasse dans le bois
Petit bois derriere chez moi
et tralonlalonlere tralonlalonla et tralonlalonlere tralonla
Dans le sparadrap
Savez vous quoi qu’y n’y a
Dans le sparadrap
Savez vous quoi qu’y n’y a
Ya un sac à main
Le plus joli des sacs à main
Sac à main dans le sparadrap
Sparadrap dans le n’almanach
n’almanach dans le peneu
Le peneu dans la godasse
La godasse dans le bois
Petit bois derriere chez moi
C’est un dépot d’ordures qu’il y a derriere chez toi
C’est vraiment trop dur dur restons pas là
C’est un dépot d’ordures qu’il y a derriere chez toi
C’est vraiment trop dur dur restons pas là
Un kilometre à pieds, ça use, ça use…»

 

Gérard Rinadi/ Luis Rego Les Charlots 1970.

 

Franchement, c’est de la bombe inaltérable, d’la vieille certes, mais d’la bombe quand même, indémodable, dans la plus pure Tradition Française : Léger et puissant à la fois. Lisez et relisez, y’a du sens et des tiroirs en pagaille!!!

C’est vrai que le bois en a inspiré plus d’un, voire d’une. La preuve…

En voilà une qui réveille les vieux scouts endormis sous leurs cravates de cadres compassés et à venir non??? Et puis par ces temps écologiques, c’est dans la bonne vaillebracheune.

Pour en finir avec le Bois, ne pas oublier le Vieux Charles! Qui boit du vrai Muscadet…

Trousse chemise.

 

«Dans le petit bois de Trousse chemise
Quand la mer est grise et qu’on l’est un peu
Dans le petit bois de Trousse chemise
On fait des bêtises souviens-toi nous deux
On était partis pour Trousse chemise
Guettés par les vieill’s derrièr’ leurs volets
On était partis la fleur à l’oreille
Avec deux bouteill’s de vrai muscadet
On s’était baignés à Trousse chemise
La plage déserte était à nous deux
On s’était baignés à la découverte
La mer était verte, tu l’étais un peu
On a dans les bois de Trousse chemise
Déjeuné sur l’herbe, mais voilà soudain
Que là, j’ai voulu d’un élan superbe
Conjuguer le verbe aimer son prochain.
Et j’ai renversé à Trousse chemise
Malgré tes prières à corps défendant
Et j’ai renversé le vin de nos verres
Ta robe légère et tes dix sept ans
Quand on est rentrés de Trousse chemise
La mer était grise, tu ne l’étais plus
Quand on est rentré la vie t’a reprise
T’as fait ta valise t’es jamais r’venue.
On coupe le bois à Trousse chemise
Il pleut sur la plage des mortes saisons
On coupe le bois, le bois de la cage
Où mon cœur trop sage était en prison.»
 

 Bon allez, j’arrête de vous bassiner façon nostalgie du mois de Novembre pour vous dire en manière de conclusion que le «Golf de Trousse Chemise», neufs trous – avec l’âge on s’essoufle – de l’Île de Ré, est un lieu à la Bobo de toute beauté… Évitez quand même les pique-niques au pâté arrosés au Bojolpif sur le green, c’est pas trop bien vu par les rombières en survêts Chanel qui s’y promènent derrière leurs bouches d’ornithorynques avides, leurs chutes d’organes, plus que de reins, leurs touffes oxygénées et leurs impossibles implants mammaires. A moins que vous n’exhibiez vos Marcels en coton mercerisé, détendus et souriants, au volant d’un Q7 discret…Tant que ma Rolex, pardon… mon solex est en réparation, j’y vais franco. Et puis merde, j’ai plus de cinquante ans!!!

Accroche-toi mon frère, la grâce est au pouvoir.

Profite donc bien de ces temps bénis où la solidarité n’est pas ta soeur pour écraser le chien de tes voisins, pour sourire à l’ange qui ne te le rendra pas, pour bouffer du Turc cru, pour enculer les mouches sans préservatif, pour te demander ce que tu pourrais bien tirer de ce cadeau de merde qui t’es tombé dessus pour ton dernier anniversaire, pour écraser la vieille au Viager joli qui te fait mariner depuis six mois, pour t’acheter le dernier portable en forme de canard à usage mixte, pour t’inscrire sur MythiquedelaFraternité, sur Livredetronches, pour te fendre le groin, sur Tateub avec les humoristes qui pètent sur des briquets, pour boire, dans la pénombre sans âme des Lounges branchés d’improbables liquides au monolithisme rassurant, pour t’anaboliser la tête et le corps, pour dévoiler tes chagrins ordinaires en direct, pour communier dans les stades avec les furieux qui tournent le dos aux fulgurances ailées des Catalans inspirés, pour dévorer la vie à pleines dents, blanches comme la chemise du littérateur éclectique, pour te faire lippo-sucer tous les trois mois, botoxé tous les quinze jours, remonter, gommer, lifter, épiler, allonger, gonfler, retendre, Barbiaiser, Jacksoniser à donf et accéder enfin à la grande famille des enfants de l’inutile, bien au chaud, collé comme la vérole du bas clergé pédophile au sein hypertrophié de la grande vacuité…

Ça doit être cet Australien ce Cloudy Bay blanc que j’ai trop bu, qui m’a dévasté. J’ai mal à mon neurone qu’avait enflé sous les pétards. Le jus de planches en plus…Le réveil n’a rien d’une résurrection, c’est plutôt bad trip now. Pfffffffff…Merde, j’en étais où? Ah oui, le Vieux Charles, Trousse chemise, le Petit Bois, les Vieux Charlots.

Ouais ok. Mais j’allais où là, je ne sais plus trop. Allez regrimpe en haut de la page. Un petit clic sur la bonne touche et te revoici au titre. Bon c’était une histoire de bois et de merveilles. Pour le supplice de la planche nuageuse, j’ai donné, c’est fait…

Ben mon gars, t’as écrit Merveilles, t’assumes, tu te demerdes, t’y vas. Bon pour le bois, avec Cloudy Bay et ses délires, c’est fait. Merveilles, merveille…j’ai même pas une DRC sous le coude, alors le trip au pays du Manège En Chantier, c’est pas gagné!!! Qu’est-ce que je vais bien pouvoir leur raconter à tous ces «bois-sans-soif» pour m’en tirer élégamment? Non là laisse tomber, c’est foutu. Les flics sont pas loin. T’es bon pour l’HP, au mieux. T’as plus qu’une solution, tu persistes et tu signes et vogue la galère. Inch’Allah!!!

Alors que je me débats dans ma purée de mots, y’a Outlook qui clignote à mort. Histoire de respirer, je jette un oeil furtif. Waouwww, c’est un Forum qui flambe. Ça se bouffe le bouchon de tous les côtés, y’a les pavés qui volent. Tiens pour ta gueule…. J’encule – minéralement – ta race. Je t’enfonce un gros cep, de pied mais pas très Franc, dans ton gros cul de connard à lunettes. Je te bourre la tronche dans la «Combe d’Orveau», mais poliment. «Combier» Cooombieeeeer, rue de Poliveau… Ça y va, ça darde, ça crache, que des tanins pas très mûrs. Y’a pas à dire, y’a d’la vie, des hormones bronzées au lance-flammes!!! Ok, c’est vrai, je brode et j’avance pas. Mais c’est toi mon gars, lecteur incertain qui me varie. Si tu recules quand j’avance, on est pas prêt d’entrer en gare…Allez, encore un petit zieutage dans le fond de la Combe. Seigneur, y’en a un qui entrechoque deux silex!!! Ouille, fais gaffe à tes…doigts!!! Du côté «Rieslings de granits», ça pulse pas mal aussi. Et l’autre grand buveur d’Alsace qui attaque les littéraires. J’m’en vais te lui foutre une piquouze de Pic Saint Loup dans la choucroute, çui-là, ça va le poser un moment!!!

Je sens le regard curieux du lecteur ( le seul qui reste encore…) qui me mate, guoguenard, par dessus les Alpes. Y va s’en tirer comment le vieux?? Il rigole dans ses moustaches le mistigri. Dans le Couloir Doré, le Boss du forum est inquiet. Il se dit qu’il a un modérateur qu’a du mal avec sa malo et qu’il va lui falloir le remplacer fissa. P…n oui mais par qui??? Le Nucléaire du Pacifique qui casse de la bouteille prépubère??? Ah le vieux de Charente, il me prend le chou…. Ou alors le vieux sage de Saujon??? Non merde c’est déjà fait. Pas de panique, un petit coup de «Charmes» 92 et j’vais trouver. Ben oui Le Caïn de Provence peut-être… Un nerveux lui aussi qui va me foutre le souk chez l’hébergeur en moins de temps qu’il ne faut pour écluser un Bandol… Ou alors l’ami Américain??? Il a de la distance, il cause le Texan, ça peut aider… Le Fred confortable??? Y va me bordeauliser le site. Le roi d’la Pignole??? P’t’être un peu trop hermite dans sa chapelle…Y s’bouffe les ongles le Dab. Quand il va soufrer son blanc, ça va piquer!!! L’Oliv de Pantin, il va nous «Fichet» au «Bricard»??? Le Paulo d’la Croix Rousse. Non, non, va me foutre la Mafia au cul le tripoteur de vertèbres!!! Enfer et acidification, j’vais quand même pas mettre le Père en stage intensif pour qu’il arrête de me coller la souris au plafond!!! Y va pas supporter de plus pouvoir se balader avec son sécateur, y va m’faire la déprime du vigneron. Et la mère va s’fââcher et… Vérole et tartriquage!!!

Pendant ce temps là, le Pape du Pic ricane dans ses poils. Y’s’dit que le viok l’est complétement barré. Va jamais oser afficher ça. Non y va pas l’faire, y va se reprendre, c’est sûr…

 Alors là, tu t’mets l’doigt sous l’catenaire Pépère… ***

Merveille, mère veille, vieille mère, vermeil, Veermer, mer verte… Allez bouge toi les synapses vieux gars.

Encore un coup d’Alzy * qui me crame doucement le disque dur. Y’avait une bouteille sur la table, avant que ça dérape. J’m’en souviens, une ventrue à verre épais et à gros cul. Oui c’est ça, j’ai goûté et je l’ai mise de côté, qu’elle prenne l’air. C’est l’étiquette qui m’avait accroché l’oeil. Ça y est, j’y suis! Le Bois des Merveilles 2004 de J.B Sénat qui promettait le Mont du même métal… Le lendemain elle était toujours belle à voir la grosse, bien posée sur son cul dodu de Vénus Hottentote, obscure et mystérieuse. Le séjour au frais de la cave l’avait délicatement voilée de fines perles fraîches de buée.

L’adversaire proposé à la grosse était de taille. Poulet de ferme rôti, découpé et retravaillé au carry. Pour épauler la bête déjà pourtant passablement relevée, un riz, pas sotto mais presque, musclé avec de ces épices Maldiviennes qui vous mettent à genou une blennoragie, rien qu’à les regarder. Quelques petits légumes de printemps cuits à la vapeur, pour que ça croque un peu sous la dent. Grand âge oblige, j’avais largement rehaussé mon assiette de quelques tours de moulin à poivre. Et je précise, du Jamaïcain cassé gros, pas du poivre pour asthmatique. Face à l’Armada, j’étais inquiet pour le vin…

Dans le verre, c’est plus du noir que du rouge, c’est net, opaque et ça brille façon Germinal. Rien qu’à l’oeil, faut s’méfier. J’ai bien vu que le poulet cherchait à se cacher sous le demi zotto et à faire joli avec quelque petits pois au dessus. Mais bon, qu’un poulot qu’à pas vu la poule fasse son timide, c’est pas la première fois. Je me suis fait une petite fourchettée de riz et volaille pour me faire l’accueilloir. Ah, pour le faire, ça l’a fait, j’étais pas loin du 18!!! L’affaire de quelques minutes et deux kleenex après, j’étais bien. Chaud et humide de partout. Un peu comme Marie Esméralda, la femme de Jean-Théobald **. Ben oui, souvenez vous, la généreuse, celle qui te pète les verres quand elle rit, celle qui te masse les triceps et les dorsaux quand elle te dit bonjour en te collant une ventouse à la commissure des lèvres, que t’en as le régular (Jean brut, non lavé) qui craque.

Oui mais bon, y’a le Minervois qui attend.

Hiératique, impavide, sacerdotale, inébranlable, imprenable, trapue, genre première ligne Catalane, une bouteille de troisième mitan, pour les durs, les inoxydables, les ceusses qu’ont des os en titane. J’te dis pas, Marie Esméralda en plus là-dedans!!! Elle te les boufferait. Les urgences débordées c’est sûr!!!

C’est tout de suite et en direct.

Ça monte au nez et c’est pas du Claudel. Des fruits noirs y’en a en pagaille et des sucrés même, bien mélangés. C’est la première couche, épaisse. Tu la traverses pas comme ça, c’est pas le style rosière fragile-mutine. T’es comme dans un cumulo-nimbus plein à craquer. Alors tu prends le temps, t’attends que ça passe, que ça te traverse le nez, voire tous les trous, comme une rétro à l’envers. Pas facile. T’as quand même un peu de morve dans la bouche mais t’avales. Puis t’as le droit à la forêt débitée en douelles, montées, chauffées et assemblées, en direct. Bien sur ça fronce un peu la narine, mais les épices du zotto que t’as croquées avant, elles t’aident bien. Histoire de faire dans la logique olfactive, le poivre noir suit. Là t’es content, t’es rassuré. T’es un bon, un intuitif, t’as senti le coup. Avec le Jamaïcain va y’avoir pugilat!!!

C’est l’heure du combat. Tu attaques dur la poulaille et le zotto. La grosse bouchée. Oublie pas de fermer les mirettes pour pas mouiller ta serviette. Mâche bien, qu’y ait pas un coin de muqueuse qui brûle pas. Là je me sens prêt, j’en mets une bonne lampée sur l’incendie qui décuple. J’ai les lunettes qui fondent!!! La merveille du Minervois a fait son oeuvre. Le curry des Maldives devient Sri-lankais, c’est alerte à Malibu force douze. Viens m’éteindre, vite Pamela. La prière ça aide dans ces cas là. J’ai pas lésiné. Zeus, Bouddha, Jésus, Mahomet, Zoroastre, Osiris, Parker, je les ai tous implorés. Une brigade pareille y z’ont pas ça, même sur Thé et Faim. La vie, les papilles, les muqueuses, même les cils qui fumaient déjà, je les leur dois. Rebelotte. Faut pas faiblir dans l’adversité comme on dit à l’Élysée!!! A la troisième tentative, les épices ont capitulé. Ouiii, oui, promis, juré, pas craché. Le vin a tout emporté sur son passage. Certes poulet et riz l’ont encadré, mais jamais il n’a plié le moindre merrain. Une matière, couillue sans être grossière, qui t’inonde le gosier, qui s’installe sans façon, qui s’incruste même dans l’émail de tes dents, dans les bubons de ta glotte de mec qui s’lave pas les dents. T’as la bouche comme un crachoir Chilien!!! Une autre bouchée de riz en feu pour voir? T’as un oeil qui clignote nerveusement. Mais foutre d’Archevêque pervers, le vin a d’la ressource. Le riz fond et les épices s’agenouillent.

Le miroir me renvoie le portrait d’un homard au regard chassieux, les antennes basses, la goutte au nez et le front moite!!! J’essaie de lui parler mais j’ai la voix des bermeilles…La finale, elle, continue à envoyer plein pot de la réglisse au chocolat poivré. C’est agréable et les tanins restent polis quand on leur cause.

Un vin à ne pas mettre sur toutes les tables. Evitez les guéridons Louis XV et préférez la table de ferme en chêne massif. Prévoyez des accoudoirs aux chaises parce que les 14°, ça secoue. Dernier petit conseil, visez roboratif et agrémentez sans modération, de piments oiseaux fourrés au Wasabi. Une sudisette là-dessus et c’est weight-watcher assuré.

Ah ben zut, j’ai oublié de vous causer des Merveilles…

Tant pire!!!

Encore que la Merveille des Merveilles… c’est d’être encore en vie.

*Alzheimer prépubère.

** “La bonne grosse teuf…”

*** Pour les grincheux-méfiants, toute ressemblance avec un ou des Fora existants serait pure coïncidence, cela va de soi.

PS : Pardonnez moi Mr Sénat, en fait j’aime bien vos vins. C’est seulement que le nom de celui-ci m’a emmené dans les profondeurs, toujours insondées, de mon imagination discutable… La dégustation est pure fiction, of course…

 

EMOTICONEETNIAISE.

FONROQUE L’ÉQUILIBRISTE…

 Bachelard. Fonroque

Fonroque. Salle de dégustation. Octobre 2010. 

—–

 Le tapis de vignes vertes que l’automne caresse à peine, comme une troupe d’enfants sages, s’étale de toutes ses feuilles autour de la maison ancienne, cossue sans plus, qu’en Bordelais on érige vite en Château…

En ce dix septième jour de ce mois d’Octobre 2010, le ciel est à la bouderie. Un ciel de winemakers, bas de plafond, humide, lourd de gros nuages gorgés d’eau comme éponges grises gavées. Il reprend la lumière de l’été, le feu est en veille. Les jours raccourcissent imperceptiblement, les énergies débordantes de la saison chaude refluent et s’en vont hiberner, lentement, – au contraire de l’homme perpétuellement agité comme une puce dérisoire – sous les terres, vers les magmas brûlants… Insensiblement les sols se taisent, la vie s’enterre pour mieux renaître.

  Alain Moueix, homme d’intérieur.

 D’entre les portes lie de vin du chai attenant aux pénates, un homme apparaît. Grand, mince, à son rythme intérieur, comme replié vers son essentiel. Sans le manteau gras qui enrobe ordinairement le succès matériel. Il sourit mesurément aux visiteur matinaux. Rien de moins, rien de trop, en phase me semble-t-il d’emblée, avec les énergies paisiblement actives de ce matin calme. Fugace, l’image intemporelle d’une être en prière profane, comme un éclair bref, me pique le cœur. Dans son regard bleu pâle qu’un soupçon d’ardoise adoucit, brille une lueur, douce comme un feu apaisé au terme d’une flambée; c’est la lumière argentée d’une conscience ouverte au monde mais étrangère à la surface des choses.

L’homme ne tourne pas le dos tandis qu’il remonte, l’arrière vers l’avant, le chemin crayeux qui fend la houle des vignes vers le haut du coteau. Doucement, clairement, méthodiquement, il nous présente les dix sept hectares de lambrusques auxquelles il a décidé de donner le majeur de lui même. Certes elles sont siennes ces pamprées, au sens que les hommes donnent à la propriété, mais il est à elles autant, au nom d’un pacte muet qu’ils ont signé en secret au nom de l’équilibre des rôles. L’homme a besoin de la nature mais elle peut aisément se passer de lui. Nous ne sommes maîtres de rien, pas même de nos illusions puériles. Certes il ne nous dit pas ça clairement, mais cela transpire de ses silences.

A la tête du domaine depuis 2000, tout en douceur – hurluberlu à tête sage – , unique dans cette région plutôt conservatrice, il remet posément, avec humilité cette nature accueillante à l’équilibre. Après un passage au biologique, il approfondit sa réflexion et perçoit la naturelle nécessité des eurythmies énergétiques. Pour recevoir le meilleur il commence par soigner. Dès lors, il met la biodynamie au service de la flore des lieux. Rassurez vous, je ne me prends ni pour un Rudolf Steiner de salon, encore moins pour un Bachelard miniature et surtout pas pour un Goethe d’opérette, et vous épargnerai les leçons de douzième main, chères aux petits maîtres qui pullulent comme oïdium par temps pluvieux sur les fils de la toile. En raccourci et sous toutes réserves, il s’agit «simplement» de redonner puis d’assurer la «santé du sol et des plantes», dans la «compréhension profonde des lois du vivant», acquise par «une vision qualitative et globale de la nature»… Sagesse ancienne, somme toute, que les apôtres du toujours plus fustigent au nom de la science pure et dure, mère de l’agriculture intensive et productiviste.

Conversation devant les marmites du Diable!

 C’est dans ces chaudrons «maléfiques» que sont chauffées, infusées, filtrées, dynamisées les eaux «homéopathiques» qui seront aspergées dans le respect du calendrier lunaire – des rythmes de la nature donc – sur les sols et les vignes.

Préparats de bouse de corne de vache.

Dans la malle aux trésors simples d’Alain Moueix, la bouse transfigurée après un hiver en corne de vache enfouie en sol, dans ces pots de terre remplis d’une substance légère, aérée, odorante, aux parfums d’humus, de sous bois et de champignons frais. Certes, ces quelques exemples ne sont qu’illustrations superficielles de la “méthode” Biodynamique et toutes critiques des «spécialistes» sont, par voie de conséquence, inutiles…

Mais le temps passe dans le sourire des vignes qui se préparent au repos. Nous passons au chai. La vendange 2010 à peine rentrée fermente, parcellisée, dans de petites cuves en béton. Les levures croquent les sucres. Les parfums ambiants célèbrent les fruits, et les jus fraîchement recueillis sont les élixirs crémeux de ces framboises juteuses et humides, oui ces tétons rouges qui fondaient sur la langue à l’aube tiède d’un jour de l’été dernier. Ça se goûte comme bonbons! Dans la pénombre de la salle de repos, les fûts font oeuvre d’élevage pendant dix huit mois. 2009 nous tend la pipette. La dégustation des vins à l’école du bois m’est d’ordinaire difficile, pour ne pas dire désagréable, tant les jus apparaissent destructurés, durs, dominés pas des tanins «genre» artichaut cru. Ce matin, rien de ces désagréments habituels. Du bas de la pente aux sols argileux-ferrugineux, au sommet de la côte – terre très peu épaisse sur roche calcaire – tout est bonheur en bouche et recracher n’est pour une fois pas urgent (d’ailleurs, j’oublie à plusieurs reprises…)! De la puissance en largeur des Merlots du bas des terres, à la verticalité tendue des vignes sur calcaire, tout se resserre et s’élance en douceur. Les Cabernets-francs (15 à 20% en moyenne) sont parfaitement tendres, onctueux et mûrs. En salle de dégustation le 2007 en bouteille, long et fruité est d’une parfaite pureté de nez et de bouche et d’une gourmandise avérée qui pousse à s’en délecter. Le millésime 2008, plus puissant, concentré, ne se donne qu’avec pudeur et ses parfums de framboise, de truffe et de zan, n’apparaissent qu’à la longue. Ces vins conjuguent nez pur et bouche précise. Élégance, tension, minéralité, matière conséquente et à terme race et distinction caractérisent, plus ou moins intensément selon les années, les vins de Fonroque. Mais toujours cette pureté, cette définition nette et cette précision d’horloger de la vigne, comme si les ceps en bonne santé donnaient leur meilleur en retour.

Dans le silence, le millésime 2009 s’accomplit…

Le temps a passé si vite que la faim nous a oubliés!

Nous quittons le Domaine, bouteilles au coffre. Alain nous accompagne sans un mot de trop, toujours juste et pondéré. Dans la voiture, au sortir de l’allée qui borde l’entrée, nous sourions calmement sans plus, comme si ces heures passées à Fonroque nous avaient appris la juste mesure – si rare – qui sied aux relations de qualité.

De part et d’autre du chemin, les vignes nous saluent imperceptiblement du bout de leurs bras ligneux. Un souffle de vent léger agitent leurs feuilles, fragiles comme des éventails délicats…

 

EAUMOPATIRACODISNE.

SUR LAPIERRE TOMBALE…

Le Tintoret. La Cène.

 

…de Marcel, je peine à imaginer une épitaphe pompeuse, alambiquée comme Gamay surproduit. Non rien, sinon fleurs sur herbes vertes et pampres tirebouchonnés.

Lapierre s’en est allée rouler ailleurs, sur les pentes douces et légères du Grand Mystère d’après. Au bout de ce tunnel que l’on dit si lumineux, si blanc, l’attendent peut-être, rieurs et transparents, débarrassés des lourdeurs ordinaires de nos petits tracas d’humains engoncés dans la matière épaisse, une foultitude de joyeux ex-lurons, hilares, extasiés. Humour céleste, il avalent à grande lampée, une liqueur immatérielle, rouge comme tous les astres d’avant départ, qui vibre et fait chanter les chœurs angéliques. Le monde diaphane, ce monde – si monde il y a – qui nous effraie nos vie durant, célèbre son arrivée… Cet âme, qui oeuvra, homme, se retourne sans doute encore, vers ceux tout en bas, qui furent les siens. Et nous, même ceux qui l’ont bu sans l’avoir jamais connu, savons qu’un homme qui fit de tels vins d’amitiés et de partages sincères, nous manquera, égoïstes que nous sommes.

Le soleil rose du petit matin, en cet automne bleu, caresse de ses rayons naissants, les croupes douce du pays Beaujolais, ce pays, beau des vins de Marcel et laid des vins fades du novembre à venir… Là-bas, à mi-pente, l’image tremblée d’une barbe de barde souriant, comme un mirage qui s’efface lentement, subsiste, un peu, encore, dans le foisonnement roux comme pubis Irlandais, des vignes qu’il a aimées et respectées…

Va ton chemin l’ami, tu laisses derrière toi les bouteilles pleines d’un bonheur naturel et désaltérant, qui mettront longtemps encore, en nos bouches de si peu d’amour en mots, les jus coulants et roulants de tous les soirs de joyeuses tendresses à venir.

Ce matin le naturel n’est pas vain, il est bon de pleurer…

 

ELAMOPIERRETIQUIROUCOLENE.

LA BARBUE ET LA TATIN…

 Le Dimanche est un un jour blanc, surtout quand l’Automne joue l’hiver.

Ça pèle et ça tombe. Les rues de ce matin de mi Octobre 2010 sont sinistres et désertes comme les espoirs déçus des militants les plus enthousiastes. C’est réservoir vide et démarreur grippé. Le bon vieux syndrome «le bonheur est sous la couette» est de retour. Mais bon la couette, à moins d’être un mutant bionique qui se goinfre au nucléaire, ça peut pas faire les six mois quand même!!! Alors il faut bien se trouver des virgules de plaisir.

Pour le bonheur, priez mes frères, il est au bout du chemin.

Ce terminus, cette fin que l’on n’atteint jamais, sauf à le confondre avec les spectacles du cirque des égos insatiables pour lesquels le superficiel et l’ultime se confondent.

La table sera le petit bonheur de ce Dimanche donc, pour le bipède que je suis.

Imaginez, une bonne Barbue, non, pas de ces barbus médiatiques qui foncent tout droit comme des boeufs aveugles dans le premier mur rouge qui se présente, mais ce poisson de choix à la chair subtile comme une Ministre de la Justice. Cuite à point, à four chaud sous ses épices, la peau craquante et l’arête rose, pâle comme un rêve de Socialiste.

Mais comment lui rendre hommage, l’accompagner, la rehausser, la magnifier, la sublimer, bref l’aider à donner son meilleur???

MEURSAULT!!! mais c’est bien sûr!!! J’m’en va péter une bonne année, une très bonne même, un Verget «Tillets» 1999!!!

Boosté par une imagination en délire, j’exulte, j’anticipe. Je bave déjà à l’idée presque tactile de ce mariage rêvé entre une chair parfumée et les caresses torride d’un vin tendre juste ce qu’il faut. Ces fruits jaunes et mûrs qui roulent entre les arêtes raidies, cette tension du vin que les fibres fondantes de la chair assouplissent, cette peau craquante que le gras ensorcèle…L’orgasme est d’abord dans la tête!!!

Tout est prêt, fin prêt même, assiettes chaudes et bouchon sain. «E va la nave», ça roule, les sens sont affutés comme des Laguioles, les mains tremblent et les papilles frétillent…

La première bouchée de Barbue, à nue, est un délice. Les épices craquantes enrobent une chair qui se rend, alanguie et complice. Hummm, je débouche à l’orée du jardin des délices. Vite que je m’abreuve aux eaux parfumées des ses fontaines délicates. Les yeux fermés et la narine palpitante je plonge dans mon verre, persuadé que le Paradis Terrestre est à moi…

Las, la grosse mère Tatin se substitue à la sylphide gracile qui devait m’emporter au Septième ciel, bien au dessus du couvercle gris de ce jour infâme. Elle me remplit les sinus des arômes vulgaires de sa pomme cuite et rassie, de ses relents de cire morte, de ses miasmes ordinaires de vernis de carnaval… Point de vergers ce jour chez Verget, mais un vin mort de chez Borgnole.

Je m’effondre.

 

EDEMOPROTIFONCODISNE.

PAS UNE MULE, ASSUREMENT…

Bartolomeo Veneto. Lucrèce Borgia.

 

Un Chateauneuf peu connu???

Ah les Papes! En ce temps là, ils étaient malins les bougres. Belle région, beaux produits locaux. En ce temps là donc, c’était le temps de la Papauté à burettes rabattues et non pas le temps actuel du Dogme à tout prix. Certes le Pape sortait couvert mais c’était sous une ombrelle, pour se protéger du soleil. Entre les deux l’équilibre reste à trouver.

Chateauneuf du Pape, Famille Bréchet, «Gabriel» 2004.

Ce jour qui est le lendemain d’hier et donc de l’ouverture de la bouteille, le vin me remercie de ma patience. Il a pris le temps de se réveiller, de s’étirer dans tous les sens. Rien que de plus normal pour ce breuvage que l’on dit «vivant». La veille à l’ouverture, il faisait carrément la gueule et pour le faire bien comprendre, il ne se privait pas d’envoyer sous mon pauvre nez de vraies bouffées désagréables de vieux placard dans lequel un rat aurait été trop longtemps enfermé. Dans ce domaine, la «parenté» avec l’humain est patente…

Assurément du Grenache blanc dans la bouteille. Une petite recherche m’est nécessaire pour apprendre que s’y adjoignent 17% de Roussane et 3% de Picardan. J’avoue que Picardan ne me dit rien, mais à ma décharge je ne suis pas très familier des CDP en général et des blancs en particulier. Re-recherche donc qui m’apprend ainsi qu’à tous ceux qui ne le savaient pas, que ce cépage serait proche de l’Oeillade blanche, autrement nommée, Aragnan, Grosse Clairette, voire même Papadoux!!! Voilà qui me fait une belle jambe… Enfin ça tombe bien, maman coud pendant ce temps là. M’en vais pouvoir m’en régaler tranquilos. Tout bien réfléchi j’opte pour Picardan qui me plait bien par son côté «viril», «Pardaillan», «Picaresque». Encore qu’Aragnan, ça le fait pas mal non plus. Le Mousquetaire, ça a de l’allure et ça plait beaucoup aux filles. Un petit côté viril, piquant, qui dégaine pour un rien…En revanche, je laisse tomber la Grosse Clairette, ça fait vin mou et déjà que je ne suis pas trop en phase avec les gros machins baraqués de la région, cela risquerait d’outrer mes préjugés déjà sur-développés. Il faudra bien qu’un jour, ou plutôt une nuiiittt le Génie de la lampe éponyme m’initie aux subtilités des gros-qui-tâchent (c’est le cas de le dire), mais qui n’y arrivent pas toujours.

Une très discrète robe pâle, une robe de vin blanc en fait qu’agrémentent quelques reflets gris et qui accroche à merveille la lumière déclinante de ce jour presque échu…

Dans le genre «j’ai besoin d’air!!», ce CDP est l’un des vins les plus gourmands et les plus résistants, qu’il m’ait été donné de rencontrer. C’est le troisième jour qu’enfin le nez vibrillonne lorsqu’il se penche, une fois encore, sur le verre grand ouvert. Là, la bougresse se donne sans plus de retenue. Le premier jour elle s’était montrée prudente, hésitante, minaudant comme une rosière surprise au sortir de la sacristie. Quelques notes fugaces autour de la térébenthine fine, de l’encaustique de ma grand-mère et du pétrole plutôt raffiné, pas très «Golfe pas très clair». De quoi appâter le chaland. Le lendemain Margot entrebâille son corsage, pour donner un peu plus. Des fleurs surtout, plutôt Chèvrefeuille avec un soupçon de Jasmin. Alors là, qu’une femme, une rosière de surcroît, m’offre des fleurs, j’ai beaucoup apprécié. L’apothéose c’est «just now!» La rosière a pris de la bouteille et se dévoile. Jamais je n’eus pu croire, qu’elle eût eu tant d’expérience et de trésors cachés. C’est la totale. J’en prend plein le pif. Le bouquet, car il s’agit bien d’un bouquet artistiquement composé, vire au feu d’artifice olfactif. Au notes sus-citées se marient et s’enroulent des touches de violette, d’anis étoilé, de fruits blancs et d’abricot mûr. Le tout avec délicatesse et élégance.

En bouche la belle est douce mais sans mièvrerie. Sous les rondeurs de la chair, la fraîcheur est là qui tempère et équilibre le tout. Encore une fois la jouvencelle est riche de bien des attraits, mais jamais elle ne devient ostentatoire ou ne tombe dans la vulgarité. On sent derrière toute cette vitalité la qualité d’une bonne éducation. Tout ce que le nez pressentait la bouche le confirme. Fruits gourmands et épicés avec ce qu’il faut de gras pour que tout cela tienne harmonieusement et enchante le palais. La rosière qui eût aussi pu faire une aimable chaisière, tire une révérence qu’elle reproduit sans jamais se fatiguer, et laisse en bouche la trace prégnante, d’une réglisse délicate.

PS : Par souci de convenance je n’ai nulle part mentionné la présence d’une impression subjectivement minérale qui aurait œuvrée dans le sens d’une quelconque structuration du vin…

 

EGAMOBYTIGACOBYNE…