Littinéraires viniques » POÈMES EXACERBÉS …

MELANCHOLIA.

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L’étrange Mélancholia de La De.

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C’est une mélancolie couleur des vieux lilas

C’est une poussière pâle qui se glisse dans mes draps

Un vieil étang ridé bordé de joncs meurtris

Et le chant des oiseaux qui se tait à la nuit

Les hérons gris salis blottis dans les taillis

Le crapaud en bouillie tombé dans le fossé

Et les étoiles s’éteignent quand un souffle exhalé

Traverse les espaces, ne laissant nulle trace.

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C’est une Mélancholia invitée par hasard

Au bal des Contes Noirs un soir de désespoir

Qui s’était déguisée en un trop fol espoir

A moins que ce ne fut un trop beau cauchemar

Mélancholia soupire, c’est une triste lyre,

Toi sale déesse tu ne sais que maudire

Tu te repais gourmande te gaves de martyrs,

A leur briser les os, les figer dans la glace.

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Mélancolie ma mie je te hais je te prie

Tu es le sang du sang blottie au fond du lit

Dans le creux de tes seins fleurit le pissenlit

Qui pousse tête en l’air sous la pierre lazuli

Sous la stèle funèbre sous laquelle un beau soir

Je n’irai pas dormir tu peux toujours sourire

Les ailes des colombes effrayées dans le noir

Mélancholia vorace, tu m’aimes à en mourir.

JE MARCHE COMME UNE OMBRE.

Sous le couvercle du sarcophage par La De.

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©Brigitte de Lanfranchi – Christian Bétourné. Tous droits réservés.

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Le vent cet enragé balaie le ciel figé

Comme le sang bleu perdu des siècles oubliés,

Les cyprès effilés, agités se balancent,

Indolents et muets, rythmant le temps qui danse.

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Dans les allées en croix du cimetière éteint,

Groupés en rangs serrés les tombeaux des anciens.

Sous la terre gelée, on entend grelotter

Les crânes et les os des corps abandonnés.

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Mais que sont devenus les cercles enchantés,

Ils y parlaient jadis la langue échevelée,

Le jabot prétentieux, le visage poudré

Entre leurs doigts crochus le monde gémissait.

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En ce jour de frimas, sous les dalles de marbre,

On entend le silence de leurs âmes éplorées.

Je marche comme une ombre vers le feu des enfers,

La dépouille sans vie va partir en fumée.

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Tous ceux qui vont mourir, autour du sarcophage

Exposé à la foule. Dans le bois qui l’étouffe,

Il crie sans qu’on l’entende. Le bel aréopage

Sait que la mort est là qui se rit de l’esbroufe.

LES HERBES SONT COUPÉES.

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La fleur crue de La De.

Illustration Brigitte de Lanfranchi, texte Christian Bétourné  – ©Tous droits réservés.

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La fleur crue tressaille sous l’abeille

Qui lui compte fleurette,

La fleur cuite s’est endormie flapie

D’avoir trop l’a tuée,

La fleur fanée rêve d’un beau bouquet

Et d’épines de roses,

A lui griffer dos et solitude.

La fleur tranchée par la dent trop dure

Saigne, pleure, et se meurt

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Le jardin flamboie, la lune est haute.

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Sur la grève verte la mer a laissé

Bouquets de fleurs salées,

Sur la grève la mouette a crié

Les trilles mortes de froid

Que la grève esseulée espérait,

Sous le flux mémorable

Le sable rit jaune au vent endiablé,

La vague l’a blessée,

Coquillages meurtris.

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Les algues se balancent, molles, décharnées.

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Le nuage a passé, le ciel se poudre

D’eaux et de grains à moudre

Au moulin des soupirs,

Le nuage salé sous ses yeux

Éclairés mais fermés,

Vraie valse des oublis,

Le nuage noir du sang déversé

Au lendemain, à l’heure

Où la lune est tombée.

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La montagne solitaire, les herbes sont coupées.

LA POÉSIE CRASSE DE SUIE.

La poésie au cœur des ténèbres par La De.

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©Brigitte de Lanfranchi – Christian Bétourné. Tous droits réservés.

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La poésie se fâche

Tous ces chialeurs l’ennuient

Elle a grand faim de froid chaud cru

De pomme d’api en terre chaude

Au bout de son couteau pointu

De compagnons et de ribaudes

De cheminée crasse de suie

De flacons rares, de gros qui tâchent

Aussi !

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La poésie est une bernache

Elle a le mors aux dents saignant

Plus une corde à sa guitare

Son gros tambour de peau de morte

Fait un bruit sourd de femme forte

La poésie est une avare

Qui donne à qui est bel amant

La poésie est une vache

Meurtrie !

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La poésie vieille patache

Ne sait pas même ce qu’elle dit

Elle a connu toutes les batailles

Les gros chagrins des petits amours

Les vieilles barbes et les moustaches

Illuminés pauvres maudits

Ont célébré ses funérailles

Mais la futée a de l’humour

Dépit !

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La poésie jamais ne lâche

Ce qu’elle tient fort entre ses dents

Et le poète est son esclave

Il ne peut rien quand elle ne veut

Il a beau faire jamais ne gâche

Les envolées ou les élans

Entre ses mains la triste épave

N’est que sa plume d’encre bleue

Oubli !

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La poésie souvent se cache

Fait bouche d’ange et grands yeux bleus

Sourit aux mièvres comme aux mutins

La poésie fait sa putain

Se donne des airs de catin

Puis elle coupe les mains

Crève le cœur et les yeux

Des timorés et des bravaches

Farcis !

La poésie aime la cravache

C’est une sans cœur et sans vertu

Elle aime à prendre à être prise

Dessus dessous en haut en bas

Pas de discours de falbalas

De ronds de jambes de rimes grises

Elle ne respire que dévêtue

La poésie est une apache

Envie !

ET QUE LA VIE.

La Vie dans l’oeuf de La De.

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©Brigitte de Lanfranchi – Christian Bétourné. Tous droits réservés.

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Et Feu créa la flamme aux arcs électriques

Aux langues écarlates échappées du soleil.

Du fond des terres sombres, lumières égocentriques

Enchâssées dans la pierre des temples et des merveilles

Évadez vous enfin des sarcophages froids

Brulez à en mourir, éclatez les cratères

Ne laissez pas la bête glacer vos cœurs d’effroi

Ni vos lèvres sucer le sang de vos misères.

Élancez vous, hurlez, remontez des entrailles

Des tripes purulentes fauchées pas la mitraille

N’oubliez pas les cris des ventres qui défaillent

Osez lever les yeux vers les cimes aigües

Jetez aux bas ravins les discours ambigus

Des hommes enlaidis par trop d’incertitudes

Il faudra bien qu’un jour le monde se secoue

Exacerbe la vie, secoue les hébétudes

Et que la vie enfin s’extirpe du dégoût.

FILLE DE GARCE.

La belle mort belle de La De.

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©Brigitte de Lanfranchi – Christian Bétourné. Tous droits réservés.

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Toi fille de garce, ma salope vorace,

Fille de pute, enfant mort-née, toi la salace,

Tapie en haut, tapie en bas, en bas de soie,

Face noire sous ta capuche, toi qui rougeoies

Tes doigts d’os durs, tes doigts glacés, ongles laqués

Sourire fielleux, dents aiguisées, ta lame pointée.

Je te regarde droit dans les yeux et te souris

Interloquée sous ta tunique, nuages gris,

Derrière mes yeux, mes pleurs grenus, au désespoir.

Mais pas question de te montrer ventre glacé

Insolemment mon doigt se tend, ta face fripée

Fureur salée, tu veux me mordre pute-carogne

Mais moi je ris, je bois mon vin en compagnie.

Le vent putride, ton âme rogue et ta sale trogne

Tu veux me prendre, que je me rende, furie !

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Plutôt mourir, foin de martyr, poitrine au vent.

D’IMPROBABLES BLANCS LYS.

Le bonheur du grand noir par La De.

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©Brigitte de Lanfranchi – Christian Bétourné. Tous droits réservés.

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Qu’as-tu fait de ta vie, cette vallée obscure,

Une étoile avortée avalée par l’espace,

Un battement de cils, une averse de glace ?

Dans le ciel lourd et noir, le vent dans les murmures.

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Alors en attendant que vienne le petit soir,

Ou la lumière lugubre d’un sinistre matin,

Dans les forêts rêvées, à la lisière du bois,

Un grand cerf a bramé dans un long cri sans fin.

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Tout au long de ton temps, derrière ton piano,

Le grand air de ta vie s’est enfuit sous tes doigts,

Entre trois fausses notes, un cri, quelques repos,

De rares fulgurances, un éclair, un éclat.

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Tu as raté le coche, perdu dans tes dénis,

Comme un ermite fou enfermé au désert,

Qui s’obstine et cultive d’improbables blancs lys,

En hurlant à tue-tête comme un loup éphémère.

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Et que verra ta mort après ton dernier râle,

Quand tu auras rejoint la touffeur du charnier,

Quand tes mauvaises humeurs pourront enfin couler

Se mêler à la terre, aux nuages, au ciel pâle ?

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Alors tu connaitras le bonheur du grand noir,

A moins qu’une tempête brodée de roses rouges,

Ne t’ouvre les portes d’or d’un nouvel abattoir,

Peuplé d’âmes légères aux yeux effarouchés.

MINE DE RIEN.

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La double mine de La De.

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 Mine de rien, mine de plomb, mine de chardon

Tu ne vois rien, je ne dis rien, terrible enjeu

Le ciel lapis, le ciel grognon, mine de chardon

Langue de chat, mine de chien, dardent les yeux !

Encre de seiche au coin des cieux, mine de son.

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Mine de cuivre, mine de givre, peau de glaçon

Le ciel se moire, ferait beau voir et la nuit bâille

Au saut du lit, coule le lait, café citron

Matin chafouin, pelure de sein, s’ouvre la faille

Dans le lointain, le cri d’un fou, coup de poinçon.

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La rose noire, reflets bleu-nuit dans la pénombre

Et vire et volte, ciel de réglisse, aux catacombes

Glisse le lin, carde la laine, le rouet siffle

Les jambes fines sous les jupons dansent à la ronde

La vielle chante, les blés sont mûrs, les vieilles tristes.

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Mais le soir tombe, l’âtre s’éteint, le fer au cœur

Rêves d’or fin, vient le matin, s’ouvre la fleur

Les brumes fondent sous le soleil, la nuit se meurt

Encore toujours chacun chez soi, pleure l’amour.

OTERO MIE, OTERO TOI.

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L’Otéro recréée de La De.

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©Brigitte de Lanfranchi – Christian Bétourné. Tous droits réservés.

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Elle a dansé la belle, le cygne en bayadère

Ploie, ondule, elle brûle, seins de satin lent,

Aux pampilles fragiles s’accroche la lumière,

Les couronnes vacillent sous ses charbons ardents

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Ses hanches lascives et ses jolis bras blancs,

Ses yeux aux puits profonds, de grands trous noirs mortels.

Un frisson dans la salle, les Princes sur le flanc,

Sur les planches elle est nue, fragile elle est si frêle.

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Entre ses doigts graciles, sous ses ongles incarnats

Les Louis d’or grondent, le sang gicle à longs jets,

Les barons, les comtes, les gredins, les malfrats,

Maharadjahs et rois, se traînent à ses pieds.

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Sa bouche, sa lèvre chaude, l’ivoire de sa dent,

Sous les plumes elle s’agite, volent les falbalas,

A ses oreilles nacrées, coquillages ou diamants,

Otero mie, Otero toi et, puis s’en va …

DIS-MOI DONC BLANCHE.

La Blanche de La De.

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Illustration Brigitte de Lanfranchi, texte Christian Bétourné  – ©Tous droits réservés.

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Toi qui as traîné dans la douleur tes hauts et tes bas dans les champs liquéfiés des

misères boueuses,

Toi qui t’es courbée à bras cassés sur le dos de la terre,

Toi qui a crocheté du bout de tes doigts d’enfant sale les pépites accrochées sous les mottes gluantes, entre les racines tordues des hivers bas de ciel,

Toi qui as connu dans ta prime jeunesse les champs noirs gorgés d’eaux glacées,

et la terre, cette suceuse immonde qui t’aspirait à chaque pas en te murmurant

des mots d’amour chuintants.

Dis moi donc Blanche, toi qui sais.

Ce que t’ont dit les hommes fous des bataillons sanglants.

Quand ivres de leur sang impur ils ont repeint les champs éventrés par leurs obus,

abominables baisers de chairs broyées, d’os brisés et de cervelles bouillantes.

Que t’ont-ils dit leurs enfants aveugles, ignorants et brutaux, assassins de l’histoire, goules des enfers,

briseurs de rêves, ennemis des tendresses, des sourires arcs-en-ciel, des couleurs épicées, des enfants étoilés.

Quand leurs hordes barbares ont coulé comme jus acides sur les peuples en déshérence.

Toi, petite fille des hommes simples, tu as fermé tes yeux de banquise lointaine aux reflets changeants, tes yeux de ciel irisé, tes yeux purs et durs

comme des billes bleu d’Anvers.

 Ton regard ciel de Delft

n’a pas cillé sous les lames tranchantes de leur haine bleu de Prusse.

Toi petite fille qui a connu le Siècle sauvage.

Dis-moi Blanche, si là-haut les anges duveteux sont aussi magiciens

que tes rêves d’enfant perdue.

Dis-moi donc Blanche si l’espoir t’a retrouvée.

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Dis-moi.