UN CHAMEAU.
L’Othello de La De.
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Illustration Brigitte de Lanfranchi, texte Christian Bétourné – ©Tous droits réservés.
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Blatérant et flânant, naviguant sur les dunes
Un chameau s’ennuyait bien plus qu’à Pampelune
Une bosse penche à gauche l’autre sur la droite
Et personne ne sait quand lui prend de tourner
Dans ses grands yeux navrés le reflet des mirages.
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De la scatologie à l’eschatologie ?
Quelques pas les séparent, pense le philosophe
Pendant que sa mâchoire mâchonne un bout de bois
Volé près d’une tente où dort un marocain
Un berbère abruti par le soleil tueur
Un bout de bois d’argan à la fine saveur
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Ses grandes dents carrées derrière sa lippe molle
Ecrasent le bois tendre, on dirait une folle
Dans son manteau de poil égaré au désert
Othello le chameau n’a besoin de personne
Il ne dit jamais rien, il rumine en silence
L’envie d’une pomme rouge à se caler la panse.
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Le grand ciel bleu de Prusse est vide comme l’estomac
Du chameau philosophe. L’image d’un grand pré
Qu’il ne verra jamais, là-bas à l’horizon
Bien sûr il n’est pas dupe, ce n’est pas un melon
Mais il donnerait cher pour tondre le gazon
Othello a la dalle du côté de Vierzon.
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Les palmiers sont si grands qu’il a l’air d’un gros rat
La palmeraie déjà ? Il n’a rien vu venir
Il pensait en marchant aux sonnets de Shakespeare
Jamais il ne s’inquiète, ne tombe dans l’effroi
Ses grosses pattes souples le mènent et il les suit
Il se fiche du tiers du quart et du demi.
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Blatérant et flânant, naviguant sur les dunes
Un chameau s’ennuyait bien plus qu’à Pampelune
Une bosse penche à droite l’autre tombe éplorée
Et personne ne sait quand lui prend de tourner
Ce soir il s’est trompé, il pensait à Voltaire
La falaise était haute il n’a même pas souffert.