La Fresque de La De.
Illustration Brigitte de Lanfranchi, texte Christian Bétourné – ©Tous droits réservés.
———-
Dans les fumées glauques des tripots flamboyants,
Dans les verts laiteux brumeux des absinthes absoutes,
Les janissaires, sous les yeux jaunes des proxénètes ondoyants,
Les hétaïres affalées, sous les graisses tremblantes des pâles puritains,
Entassés comme des veaux dans les salons noirs des abattages,
Plus glorieux que les éléphants aux portes de Carthage,
Où les navires si beaux, vomissant les rats quittant les soutes,
Quand les marins s’enfuient, ivres comme des capitaines,
De frégates en rafiots, de boutres en bars à foutre,
Jusqu’à Valparaiso la belle, en passant par la triste Beyrouth,
Les derviches flottants dansent, en toupies or not, sur les fils de l’extase,
Enfin à tous ceux, vivants ou morts, qui encombrent ma route,
Je dis qu’il est si bon de boire, à plus soif, au fleuve Amour,
Quand le soleil se meurt, ses eaux sont pur velours …
———-
A égorger des loutres molles, à violer les cœur des putains,
Barbares et Cathares, aventuriers, illuminés ou très saints,
Dans le capharnaüm, au cœur du maelstrom des mondes en perdition,
Des chacals aux loups, efflanqués et sanglants, sans négliger les chiens,
Dans les algues vertes des mers trop profondes, sous les glaces sans tain,
Au pays disparu, Alice, si drôle, qui rit, pleure, et dépèce son lapin,
Sous les vieilles terres grasses, trop noires, au pays des momies,
Ô mes frères, fantômes errants, de géhennes en ignominies,
Mes sœurs dissolues, exaltées, aux âmes blanches distendues,
Dans les bouges infects, les gouges, de Brest à Macao,
Sur les monceaux d’or fin, dans vos culs, enfoncés en lingots,
Sous les rafales sifflantes, les complaintes, les insultes crachées,
Je dis qu’il est si bon de boire à mourir, au fleuve Amour,
Quand le soleil se lève, le ventre de son âme, pour toujours …