LE FRELON.
Vespa le Capulet par La De.
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©Brigitte de Lanfranchi – Christian Bétourné. Tous droits réservés.
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Vespa est un frelon qui file ventre à terre,
Son vertex globuleux et son gastre arrondi
Le distinguent des guêpes en habits de panthère.
C’est un vrai cuirassé qui déchire les airs,
Et sa chitine épaisse ne craint pas le roulis.
Son dard est virulent, un regard, il jaillit .
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Vespa est amoureux d’une petite abeille,
En habit de lumière elle danse autour des fleurs,
Mais les clans sont en guerre, inutiles rêveurs.
Aux quatre coins des champs de gros yeux les surveillent,
Juliette fine mouche s’est cachée dans une souche,
Mais Vespa le lourdaud est un frelon qui louche.
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Il a beau la chercher, Juliette a disparu !
Puis le vent s’est levé et Vespa s’est perdu,
Quand la nuit est tombée, les guetteurs sont partis,
Les ruches ont bâillé, ils se sont assoupis.
A l’abri dans sa grotte Juliette a mouliné,
En faisant plus de bruit qu’une troupe de pompiers.
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Près de l’abeille Juliette, Vespa s’est allongé,
Longuement dans le noir leurs trompes se sont cherchées,
Ils ont mêlé leurs sucs dans un très long baiser,
Leurs ailes embrassées comme des soies damassées.
Les couleurs de l’amour brulaient dans la pénombre,
Ils auraient tant aimé que la nuit soit plus longue.
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Mais le coq a chanté, la vie s’est réveillée,
Les guerriers des deux ruches enfin les ont cernés,
La bataille fut rude, on vit beaucoup de corps,
Regards exorbités, par la mort apaisés,
Recouvrir tout le champ, quel sinistre décor
Pour les deux amoureux aux cœurs dilacérés !
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Vespa le Capulet, Juliette la Montaigu,
Ont péri tous les deux, Shakespeare l’a voulu.