ET LES BRAISES ROUGEOIENT.
L’ange et la bête de La De.
Illustration Brigitte de Lanfranchi, texte Christian Bétourné – ©Tous droits réservés.
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Mon amour de laine douce, ta peau de lait frais
Ton verger. Hespérides des Îles sans le vent
Les fruits et le nectar. Le fiel acerbe, tes yeux.
Tu glisses sur mon haleine, respir de menthe fraîche,
Voyelles dans la lumière de la nuit de tes flancs,
Et la noix sans coquille serre doucement
Le long des rives molles de tes lèvres entrouvertes.
Tu danses la barcarolle de ma vie. Tes flèches aiguës,
Absolue délivrance, abîmes délicieux
Où les monstres marins dansent des gigues folles
Quant au ciel les étoiles clignotent pour mourir,
Comme les fruits éclatés dans ma main qui les tue.
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Psaumes doux murmurés aux ongles des ascètes
Dolents. Cuticules noircies, pulpes au sang. Toi
Reine tremblante, ton cœur en balbutiements,
Consonnes gutturales, les rires des houris.
Les prairies sont mortes, les chiens errants aussi,
Dans les tours désolées des châteaux, oui les rois,
Sous leurs brocarts brodés, ivres d’acides ciguës,
Sur les nappes damassées, les armes de Tolède
Luisent dans les fourreaux, et les braises rougeoient.
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Hors les draps de soie blanche et les eaux déversées,
Dans les obscurités des mondes entraperçus,
La fille des Atlantes sourit derrière ses voiles.
Au temps des rois, ivres de ses charmes de sorcière
Elle a connu le lait suri, rance, indigeste,
Les supplices si lents, les courroux, la misère,
A l’amour espéré jamais ne se haussa.
Aux jardins mûrs des âges, perchée aux arbres en fleur,
Allongée, ébahie, elle se love la vigogne,
Son pelage de miel s’étale comme un arc,
Le lait de sa chair coule dessous ma poigne trop forte,
Son âme est au zénith et son cœur à la forge.
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Je suis le diable noir, celui que dieu révère
Et je vais hébété, ta chevelure m’enfièvre,
Toi la goule radieuse, l’ange aux yeux aperts.